Nous voulons saluer ce soir la mémoire d’une figure de
notre collège.
Une arrivée à Rocroy, une entrée au collège, dans ces murs
ayant vu tant d’élèves, c’était d’abord entendre cette voix
qui s’élevait au-dessus de toutes les autres et du brouhaha
matinal, cette voix de Jean le Moucheux qui vous appelait à
l’ordre, au silence, au respect et parfois au réveil.
De la sixième à la troisième, les professeurs changeaient,
les classes se reformaient, les camarades évoluaient.
Monsieur le Moucheux était lui toujours là, constante
autorité du surveillant général du collège. Repère et
personnalité marquante, il maîtrisait parfaitement
l’équation entre la proximité nécessaire pour nous
connaître, et la distance indispensable pour nous tenir.
Elèves, nous redoutions son regard exercé, lucide,
connaisseur de nos facéties et de nos erreurs.
Monsieur le Moucheux savait manier, plus encore que le
sifflet ou le jeu de clés, la juste sanction. Qu’il s’agisse
des immuables avertissements, consignes, mise à la grille
(jusqu’à ce que ladite grille n’existe plus), que cette
sanction émane d’un professeur, surveillant ou membre de la
communauté éducative, elle était assignée et appliquée avec
fermeté et détermination, mais toujours dans un esprit,
d’apprentissage, de pédagogie, d’amélioration de l’élève, la
devise ‘In Labore Requies’ en filigrane. Pour lui, cette
décision n’était utile que si elle montrait le chemin.
Cette fonction, monsieur le Moucheux l’a incarnée avec toute
la droiture et la justesse qu’elle nécessitait. Là ou
d’autres y verraient une rupture du lien avec l’élève, un
renoncement à l’échange, lui faisait appliquer les règles
avec conviction et conscience.
Sa mission était difficile, mais elle l’animait. C’était
toute sa force, et elle nous protégeait.
Pour nous, élèves, il était secret. Sans doute lui
causions-nous des préoccupations fréquentes, qui ne lui
permettaient pas d’avoir autant de disponibilité qu’il
aurait voulu pour sa famille, à qui nous pensons
aujourd’hui. Sans doute décevons-nous parfois ses espoirs de
nous voir grandir plus vite, grandir enfin. Il n’en montrait
cependant rien, ou si peu.
Nous garderons en mémoire cette volonté de Jean Le Moucheux
de nous voir toujours mûrir, nous assagir, et sa constante
bienveillance à l’égard de tous ceux qu’il a rencontrés dans
notre institution. Puisse-t-il entrer apaisé dans son
éternité : avec son aide, nous avons bien grandi.
L'Association Amicale des Anciens Eleves
de l'Ecole Rocroy Saint Léon
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